Malgré
mon âge, comme dévié mais avoué certainement bien avancé, j'apprends tout de
même toujours et encore certains jours. En effet, je ne connaissais pas le
signifié de ces termes. En réalité, ils désignent une parole d'adieu. Ils
représentent alors une valeur sacrée.
En démonstration, voici ce que Socrate en pensait :
Selon vous, je ne vaux donc pas les cygnes pour la divination; les cygnes qui, lorsqu'ils sentent qu'il leur faut mourir, au lieu de chanter comme auparavant, chantent à ce moment davantage et avec plus de force, dans leur joie de s'en aller auprès du Dieu dont justement ils sont les serviteurs. Or les hommes, à cause de la crainte qu'ils ont de la mort, calomnient les cygnes, prétendent qu'ils se lamentent sur leur mort et que leur chant suprême a le chagrin pour cause; sans réfléchir que nul oiseau ne chante quand il a faim ou soif ou qu'un autre mal le fait souffrir; pas même le rossignol, ni l'hirondelle, ni la huppe, eux dont le chant, dit-on, est justement une lamentation dont la cause est une douleur. Pour moi cependant, la chose est claire, ce n'est pas la douleur qui fait chanter, ni ces oiseaux, ni les cygnes. Mais ceux-ci, en leur qualité, je pense, d'oiseaux d'Apollon, ont le don de la divination et c'est la prescience des biens qu'ils trouveront chez Hadès qui, ce jour-là, les fait chanter et se réjouir plus qu'ils ne l'ont jamais fait dans le temps qui a précédé. Et moi aussi, je me considère comme partageant la servitude des cygnes et comme consacré au même Dieu; comme ne leur étant pas inférieur non plus pour le don de divination que nous devons à notre Maître; comme n'étant pas enfin plus attristé qu'eux de quitter la vie !
Ce texte démontre si bien l'essence de l'univers, en tout cas, la nature naturelle de notre planète. À savoir que le décès de l'individu, du moi-je, est simplement le processus tout à fait normal de l'évolution de l'espèce et que seule la mort complète de cette dernière est la seule et véritable fin, pourtant, elle tout aussi, inéluctable…
Alors, pour se garder matérialité, l'homme s'est inventé une vie hautement supérieure dédiée aux délectations et aux distractions afin de supporter sa finalité destinée mais principalement afin de mieux accepter sa perte perçue et vue tellement égocentrée. Tenir absolument la mort éloignée et surtout, brûler le temps pour ne pas y penser. Pourtant, vivre le moment, exister dans l'instant n'est pas automatiquement synonyme de jouissances à pressants pour tous les plaisirs possibles, imaginables et tellement humains…
Hors toutes croyances, en dehors de n'importe quelles dépendances seulement en cette naturelle occurrence, il reste cette pause à simplement se poser sans plus s'interroger pour naître tout en sérénité afin de laisser véritablement venir cette belle et juste destinée…
Je vis sans vivre en moi-même,
Dans mon espoir sans limites,
Je meurs de ne pas mourir
Je
vis dans la seule confiance
Que je
dois un jour mourir...
Parce
que, par la mort, c'est la vie
Que me
promet mon espérance.
Mort
où l'on gagne la vie,
Ne
tarde pas, puisque je t'attends,
Car je
meurs de ne pas mourir...
Dans la seule confiance
De mourir un jour, je vis,
Car c'est vivre que mourir,
M'affirme mon espérance...
Mort qui nous donne la vie,
Ne tarde point, je t'attends,
Je meurs de ne pas mourir...
Thérèse d'Avila, extraits.
Mon chant du cygne est ce fil, lui étiré de toute une vie, la mienne qui très lentement s'effiloche mais encore infiniment s'accroche. Car si la mort ne m'effraie pas, elle me chagrine uniquement dans l'approche de cette seule perspective : l'après pour ceux qui me sont proches. Une bêtise à naître goutte l'eau qui existe et persiste à durer le temps qu'elle coule et compte doucement…